Ma féminité.
Je suis née fille mais j’ai grandi garçon.
J’étais la dernière d’une fratrie composée uniquement de filles. L’espoir de mon père d’avoir enfin un fils avec lequel il partagerait son amour du foot ou de la boxe s’est évanoui à ma naissance.
Mais, moi, ce père, je le voulais alors je lui ai donné ce qu’il attendait avec tant de dévotion et de talent que j’en ai perdu la fibre profonde qui faisait de moi une fille.
Gamine, j’imaginais qu’il suffisait de quelques accessoires pour faire de moi une femme. Une paire de chaussures à talons hauts, des bas, du maquillage, un sac à main et hop, je devenais femme! Un coup de baguette magique et le garçon manqué que j’étais se transformerait en femme.
Pas besoin de ressentir cette féminité dans ma chair, l’apparence suffisait.
Mes croyances d’enfant se sont envolées le jour où j’ai été confrontée à mon corps.
Je ne pouvais même pas me cacher derrière un corps longiligne, androgyne, le temps que je me fasse à l’idée d’être une femme, car la nature, avec son sens de l’humour si particulier, m’avait doté d’un corps plantureux, on ne peut plus féminin, avec des hanches et une poitrine généreuse.
Mais, alors que le miroir me renvoyait l’image d’une femme, mon ressenti en allait autrement. Cette personne face à moi était en total désaccord avec mes aspirations profondes. Je ne voyais qu'une inconnue.
Une inconnue qui me laissait indifférente, vide, sans âme.
Et c’est mon désir de devenir mère qui m’a éveillé à ma féminité. Je suis devenue une maman.
Une maman douce, aux gestes tendres, pleins d’amour.
Peut-on vraiment retrouver sa féminité en passant par la maternité ? Même si se sentir femme et mère sont deux choses différentes, je crois qu’il y a plusieurs façons de renouer avec sa féminité.
J'ai choisi le chemin qui me paraissait le plus naturel à mes yeux. Pour moi "être une femme" ne signifiait rien, par contre, "être une mère" agitait ma sensibilité profonde. J'avais en moi cet instinct maternel et c'est lui qui m'a éveillé à ma féminité. C'est lui qui m'a fait oublier le garçon que j'ai si longtemps incarné.
Je me suis peu à peu détachée de mon père. Je devais en passer par cet éloignement pour couper les ponts avec ce MOI enfant qui voulait offrir à ce père malheureux une raison de sourire.
Je me suis éloignée pour me rapprocher de celle que j'étais sous ce déguisement de garçon. Et cette femme en moi, je l'ai rencontrée, lui ai sourit timidement en lui tendant la main.
Cette femme, en moi, je veux la connaitre et la laisser s'exprimer au grand jour. Elle était endormie, elle s'éveille peu à peu et la douceur avec laquelle elle s'impose m'aide à croire qu'elle mérite ma confiance.
J’étais mère... j’apprends à devenir femme.
Photo by Silecia (deviantart)